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Les Masques de Nyarlathotep

Moïra Macfayden, Jake Mackalister, Sam J. Thomas (RIP Fanta Kemet) et Edward Finch dans une aventure l'Appel de Cthulhu.

Session 31 - 13/12/2018

Edward Finch avait déjà eu l'occasion d'étudier la pyramide inclinée, un édifice unique en Égypte. Aussi appelée pyramide rhomboïdale, adjectif qui faisait référence à sa forme particulière et ses faces légèrement bombées, elle avait été construite par Snefrou, le premier Pharaon de la quatrième dynastie. Sa forme particulière avait imposé aux architectes de réviser leur plans initiaux pour que le monument ne menace pas de s'effondrer. 

Alors qu'ils approchaient de la pyramide, ils distinguèrent quatre gardes à l'entrée à l'aide de leurs jumelles. Ils reconnurent l'uniforme  de la police du Caire, et l'insigne de la section chargée de la protection des monuments historiques. Les vigiles étaient en poste, mais leur posture nonchalante suggérait que la faible activité au niveau de ce site les avaient plongé dans un ennui profond. Le groupe décida d'observer les alentours avant de s'approcher d'eux.

Ils eurent ainsi l'agréable surprise de découvrir une entrée non gardée à l'arrière de la pyramide. Cela n'avait rien d'une entrée officielle, du moins Edward n'avait pas souvenir d'être tombé sur une mention de celle-ci lors de ses lectures. On avait plutôt l'impression que des blocs de pierre avaient été retirés, laissant place à un accès qui aujourd'hui, était barré par des planches de bois. Moïra, qui avait l'habitude de dater des antiquités, était un peu près sûre que l'usure du bois correspondait au temps qui s'était écoulé depuis la venue de l'expédition Carlyle. Sur une suggestion de Moïra, ils détachèrent la planche la plus basse,  et rampèrent pour entrer, avant de ramener du sable au niveau du passage qu'ils avaient créé. Cette méthode avait l'avantage de rendre peu visible leur intrusion. 

Le tunnel auquel ils venaient d'accéder était brut et sans ornement. Ils s'y engagèrent à la lueur de leurs lampes torches. Cette ligne droite, légèrement descendante, leur sembla longue, très longue, à tel point qu'ils se demandèrent s'ils n'étaient pas en train de dépasser la pyramide. Ils finirent pas arriver à un coude, où le couloir partait à 35 degrés vers la gauche en remontant. Au bout de quelques temps, ils rencontrèrent un autre angle partant vers le bas et à gauche...

Après plusieurs virages, ils finirent par déboucher sur une chambre funéraire vide, où il ne distinguèrent que deux colonnes au fond de la pièce. Edward fût étonné de constater que ces piliers, comme les murs, ne portaient toujours aucune inscription. En passant ses mains sur les parois à la recherche d'un mécanisme, Fanta s'aperçut avec effarement que le mur entre les deux colonnes semblait translucide. Progressivement, il devint complètement transparent et bientôt elle put passer sa main à travers... Avec une certaine appréhension, les investigateurs traversèrent un à un le mur devenu invisible. De l'autre côté, ils trouvèrent une série de rampes montantes, ce qui les laissa penser qu'ils étaient peut-être en chemin vers le sommet. Le professeur Finch, qui depuis le début essayait de consigner leur itinéraire dans son carnet, était profondément désorienté, car l'organisation de ce lieu ne ressemblait en rien avec ce qu'il savait de l'architecture des pyramides...

Après une nouvelle marche, ils arrivèrent devant une arche haute de quelques mètres. Ce nouvel élément présentait enfin des inscriptions, composées d'une mélange de signes inconnus et de hiéroglyphes. En grimpant sur les épaules de Jake pour les examiner à la lueur de sa torche, Edward put affirmer que le texte évoquait le Pharaon Noir, sans pouvoir en distinguer le sens.

Au delà de l'arche, il y avait encore quelques marches qui débouchaient sur une salle d'une vingtaine de mètres carrés. Inexplicablement, elle leur paraissait d'une noirceur encore supérieure à celle des espaces qu'ils venaient de parcourir. Au fond, à l'opposé de l'entrée, se dressait un trône d'obsidienne, sertis de pierres scintillantes. L'essentiel de la pièce était occupé par six piliers de pierre d'environ 1m50 de haut, surmontés par une vasque. Au fond de chaque vasque se trouvaient des gemmes singulières, d'une couleur indéfinissable. Les investigateurs s'aperçurent que la configuration de la salle correspondait à un passage écrit par Montgomery Crompton dans La Vie d'un Dieu...

En inspectant le reste de la salle, ils remarquèrent trois éléments sur les murs : un bas-relief avec des hiéroglyphes, un planisphère et ce qui ressemblait à une carte astrologique. Edward commença à examiner le texte égyptien, dont la lecture s'avéra troublante. Il s'agissait d'une prophétie qui annonçait la naissance future du "fils de Nyarlathotep" sur la Montagne du Vent Noir (ils savaient que celle-ci se trouvait au Kenya). Celle-ci serait suivie d'une "vaste destruction"... 

Pendant ce temps, Fanta se pencha sur la carte stellaire située sur la gauche du trône. Le motif central était entourée d'une bordure composée de différents signes, une fois de plus d'origine indéterminée. La représentation de l'univers proposée aurait eu de quoi déconcerter même le plus brillant des scientifiques, tant celle-ci était étendue. Fanta avait l'impression qu'elle dépassait de loin les connaissances astronomiques actuelles. Sur sa terre natale, elle avait appris à se repérer en observant les étoiles, mais elle était loin d'être  une experte. Pourtant (elle n'aurait pas su dire si c'était l'atmosphère particulière de ce lieu qui exacerbant ses capacités), elle parvint à repérer le système solaire sur la carte, et ce alors même qu'il y figurait minuscule. Et en l'examinant de plus près, elle sut immédiatement que la configuration des corps célestes renvoyait à une date précise : celle de la prochaine éclipse totale du soleil, prévue pour 14 janvier 1926, c'est à dire dans moins d'un an... Impressionnée par son décryptage, les compagnons de Fanta la laissèrent se diriger ensuite vers le planisphère. Une fois de plus, la représentation défiait la logique. Compte tenu de la date à laquelle était censée avoir été réalisée cette carte du monde, il était inconcevable qu'elle puisse être aussi exacte. Les  connaissances géographiques des Égyptiens de l'Antiquité n'avaient pas atteint un tel niveau. Et pourtant, ils avaient bien face à eux une image de la Terre assez familière. Sur celle-ci, trois gros rubis étaient incrustés : le premier à l'est de l'Afrique, le deuxième en Australie occidentale, et le troisième dans la Mer de Chine. De l'angle africain partait également une bande d'obsidienne qui traversait l'océan indien. Fanta posa ensuite son regard sur une inscription qu'étrangement, elle réussit à comprendre, et lut donc à haute voix pour les autres : "Dès lors, les Grands Anciens pourront revenir, tous trembleront."

Soudain, de hautes flammes surgirent de chacun  des six pilliers. Seuls brillaient ces lueurs irréelles, le reste de la salle était enveloppée dans des ténèbres plus profondes que jamais. Alors au fond de la pièce se matérialisa progressivement une silhouette, celle d'une jeune homme svelte, assis nonchalemment sur le trône. Sa peau d'un noir intense contrastait avec l'or de sa couronne et de sa somptueuse parure. Sa prestance, ses traits fins d'une beauté époustouflante avaient de quoi susciter l'adoration, de celle qu'un peuple devait à son prince. Et pourtant, l'aura qui se dégageait de cette l'apparition n'avait rien de providentiel. Au contraire, les investigateurs sentirent s'installer l'angoisse du dormeur qui réalise qu'il est prisonnier de son cauchemar. Car par moment, le visage parfait du jeune seigneur, illuminé aléatoirement par les flammes, semblait se creuser pour ne laisser apparaître qu'un... crâne noir. Un squelette sombre vêtu comme un prince d'Egypte, un squelette qui leur rappelait le buste aperçu dans le sous-sol de la maison Misr... Le buste du Pharaon Noir.

Et soudain, une voix d'outre-tombe raisonna dans leurs têtes...

"Voilà donc...
*
ces insolents petit insectes
*
qui ont enchainé ma Reine...

*

Qu’espérez vous donc
*
à venir profaner le sommeil séculaire
*
des pierres antiques ?

*

Seriez-vous venus me rendre hommage ?
*
Seriez-vous venus m'offrir vos ames ?

*

Quelle vérité...
*
êtes-vous venu quérir ici ?

*

Embrassez du regard ce qui vous entoure...
*
Contemplez les présages de l’inéluctable
*
Acceptez l’évidence…

*

Vous savez déjà que vos efforts dérisoires...
*
vous condamneront à l’échec et au désespoir…

*

D’autres ont emprunté avant vous
*
ces sentiers ténébreux...
*
et qu’y ont-ils trouvé ?
*
sinon le Chaos et la Mort ?

*

Vous avez reçu la révélation
*
en entrouvrant le rideau
*
séparant un univers
*
qui n’a jamais été à leur mesure
*
de la scène
*
où s’agitent,
*
toutes ces fourmis pathétiques
*
entretenant
*
l’illusion d’une conscience.
*
Ce faisant,
*
vous avez marqué
*
vos corps et vos âmes
*
du sceau de l’Inconcevable.
*
Il est temps d’accepter cette vérité
*
désormais ancrée au fond de vous :

*

Vos actes sont inutiles.
*
Toutes les portes vous sont fermées.
*
Tous vos rêves sont condamnés.
*
toutes vos luttes sont futiles.
*
Vous le savez.

*

Je suis
*
celui qui vient de l'orient.
*
Je suis
*
celui qui hante les ténèbres.
*
Je suis
*
l'Effigie de la Haine.
*
Je suis
*
le Chaos Rampant,
*
Nyarlatothep
*
Prosternez-vous."

Fanta, Moïra, Jake et Edward avait écouté en silence le discours du Pharaon Noir, sans bouger. Et pour cause, ils étaient paralysés. A cet instant, ils sentirent néanmoins qu'ils pouvaient exécuter un unique geste : mettre le genou à terre. Sauf qu'aucun d'entre eux n'avait la moindre envie d'obéir à Nyarlathotep... Ils restèrent donc immobiles et debout. Mais le Pharaon Noir n'en avait pas fini avec eux... Il reprit la parole :

"Vous avez souffert...
*
Vous méritez
*
une récompense.

*

Je m'adresse
*
à celui
*
qui ère
*
sans but,
*
sans quête
*
et sans destin
*
Jake....
*
Que serais-tu prêt à faire
*
pour retrouver ton membre perdu ?
*
Je suis un dieux généreux
*
Je t'offre...
*
La renaissance de ton bras
*
En échange, sacrifie moi l'âme d'une personne à laquelle tu tiens,
*
Je demande une âme, pour ta chair
*
Nomme ton âme ou garde le silence
*
Fais ton choix."

Jake ne prononça pas un mot. Et la voix de Nyarlathotep se fit entendre à nouveau :

"Je m'adresse
*
à celle dont la vie est consumée
*
par la haine et la vengeance.
*
A celle qui oublie son véritable objectif
*
Fanta...
*
Que serais-tu prête à faire
*
pour pouvoir observer l'inconcevable ?
*
Je suis un dieux généreux
*
Je t'offre l'élévation de ta minable conscience
*
Une âme, pour un esprit
*
Nomme ton âme ou garde le silence."

Fanta sembla hésiter, mais elle ne dit rien. Et la voix caverneuse du Pharaon Noir résonna à nouveau :

"Je m'adresse
*
à l'héritière d'une famille consumée par les ombres
*
à celle qui ne supporte pas sa propre race
*
Moïra
*
Que serais-tu prête à faire
*
pour restaurer l'honneur
*
souillée de ta famille ?
*
Je suis un dieux généreux
*
Je t'offre la purification du nom McFayden
*
Une âme, pour ta réputation
*
Nomme la ou garde le silence."

Moïra resta stoïque. Et à nouveau, le Pharaon Noir parla.

"A celui qui veut sonder la vérité, dans sa risible quête d’un sens...
*
A celui qui a tout à perdre
*
Edward
*
Que serais-tu prêt à faire
*
pour observer ce qui est arrivé à ceux que tu cherches ?
*
Je suis un dieux généreux
*
Et car ton âme
*
est déjà sacrifiée
*
Je t'offre
*
La vérité.

*

D’autres avant vous ont également cru pouvoir
*
se mettre en travers de mes desseins.
*
Voyez où cela les a mené..."

Le Pharaon Noir esquissa un geste de la main et aussitôt, devant eux, une sorte de flaque apparut dans l'espace vide devant eux. Elle grossit petit à petit. Les investigateurs réalisèrent qu'il s'agissait d'un sorte d'écran qui projetait une image de plus en plus précise...

Plusieurs personnes s'agitant et bavardant dans la nuit autour d'un feu de camp. Des tentes plantées dans une vallée au beau milieu d'une végétation familière pour l'une d'entre eux... Le Kenya. Soudain, le silence, la tension. Puis les cris, et dans le ciel, l'ombre de créatures ailées que Moïra reconnut alors. Le chaos, la résistance inutile des membres de l'expédition. Les corps de Roger Carlyle, Robert Huston, Aubrey Penhew, Hypathia Masters et Jack Brady mis en pièces...

Même si cette vision soulevait plus d'une question, il ne faisait aucun doute que les investigateurs venaient d'assister à la fin de l'expédition Carlyle. Mais le Pharaon Noir ne leur laissa pas le loisir de réfléchir davantage...

"Voyez comment finissent ceux qui se mettent en travers de mon chemin.
*
Même les braves
*
rencontrent leur destin.
*
Ne les entendez-vous pas la nuit
*
chuchoter dans vos rêves ?

*

Vous vous raccrochez à des chimères…
*
"Vous ne pourrez rien empêcher.

*

Combien devront encore mourir
*
pour votre quête insensée de vengeance?
*
Poursuivez votre vaine entreprise
*
et nombreux périront sur votre route
*
avant de suivre votre propre déliquescence...
*
Mais je vous l'ai dit
*
Je suis un dieu généreux
*
je vous offre l’oubli…"

Une nouvelle vision. Le vent, chargé de flocons. Un pneu crissant dans la neige devant un bâtiment... L'hôtel Chelsea ! Jackson Elias, dans la chambre 410, qui patiente, en vie.

"Restez ici ou rejoignez le
*
Faites votre choix..."

Ils le savent, des gens vont descendre de cette voiture. Il n'est pas encore trop tard, ils pourraient le prévenir... Sur le visage du Pharaon Noir, qui n'a plus rien d'humain, s'est dessiné un sourire cruel.

"L’arrogance de votre espèce
*
croyant percer les mystères de l’univers
*
est tellement pitoyable tant votre perception du temps est obsolète.
*
A chaque instant, votre ami vous appelle,
*
à chaque instant sa porte ne cesse de s’ouvrir,
*
à chaque instant vos pas vous mènent vers la tragédie.
*
Et si vous pouviez en sauver un et reprendre
*
à partir de là
*
vos petites existences
*
dans le confort de l’oubli ?

*

Faites votre choix..."

Alors une fois de plus, Jake, Fanta, Moïra et Edward restèrent silencieux et immobiles. Ils savaient ce qui allait se produire mais ils ne voulaient pas revenir en arrière, ils ne voulaient pas reculer, même devant le Pharaon Noir, surtout pas devant le Pharaon Noir. Et même si ce n'était pas facile à accepter, ils savaient que leur quête exigeait des sacrifices, que ce soit celui de leurs propres existences telles qu'elles avaient été jusqu'à lors, ou celui d'autres vies.

Alors il ne bougèrent pas. La porte de la chambre 410 s'ouvrit, et Petiboo surgit, accompagné d'hommes armés de prangas et coiffés de curieux appendices rouges... La Langue Sanglante... Les hurlements. Le sang, le sang partout, giclant, maculant les murs...

Et c'est ainsi qu'ils assistèrent, impuissants, à ce par quoi tout avait commencé : le meurtre de Jackson Elias... avant de perdre connaissance.

Lorsqu'ils revinrent à eux, il réalisèrent qu'ils se trouvaient dans le tunnel juste au niveau de l'entrée qu'ils avaient empruntée. Leurs vêtements leur semblèrent couverts de poussière... Comment étaient-ils revenus ici ? Et combien de temps, au juste, étaient-ils restés dans cette pyramide ...?​​​​​​

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