Session 29 - 21/11/2018

Le sauvetage et la destruction de la ceinture avaient été des épreuves de taille pour les quatre investigateurs. Fanta et Jake, en particulier, avaient été sévèrement blessés pendant l'affrontement dans le sous-sol d'Ibn Tulun. Ils avaient maintenant besoin de soin et de repos. Ils demandèrent à Ali Kafour s'il pouvait faire venir son médecin dans l'après-midi. Le reste de la matinée, ils firent un aller-retour à la mosquée d'Ibn Tulun, où ils eurent la tristesse de constater que les secours s'affairaient autour de grands sacs noirs, dont le nombre ne laissait planer aucun doute : il s'agissait des corps de Zehavi, de Nessim et des oulémas. Aucun n'avait survécu. Ils rentrèrent donc chez le Docteur Kafour pour y recevoir des soins. La décision fut prise de prendre du repos pendant cinq jours, jusqu'au 19 mars. Le conservateur estimait qu'il était trop dangereux que le groupe séjourne chez lui, mais il accepta de prendre des dispositions pour leur réserver et aménager sommairement une salle de stockage dans les sous-sols du Musée du Caire, en prétextant qu'ils étaient de prestigieux scientifiques venus étudier les pièces du musée. Edward, dont le rapport à l'égyptologie avait partiellement été bouleversé par les récents événements, était plus que ravie de se se replonger dans ce qui avait occupé l'essentiel de sa vie. Il occupa ses journées à lire tranquillement et à s'émerveiller devant les pièces stockées et habituellement inaccessibles aux visiteurs. Moïra déplorait le confort rustique de leur lieu de résidence, mais cela valait toujours mieux que les taudis du vieux Caire, et elle ne s'accommodait pas non plus trop mal du fait d'être entourée par des antiquités. Jake alternait repos et entraînement physique. Comme lors de leur traversée en bateau, ces périodes de tranquillité lui offrait une occasion idéale de s'exercer pour compenser la perte de son bras. Fanta dut également se reposer pendant la majeure partie des journées. Elle avait cependant décidé de se faire confectionner des protections en prévision d'un futur affrontement. Après avoir interrogé plusieurs échoppes, elle tomba finalement sur un tanneur qui, même s'il n'avait rien d'un spécialiste, accepta de réaliser pour elle une tunique de cuir, plus légère et viable que l'armure improvisée en métal que lui avait proposée un artisan chaudronnier.

Le groupe put donc profiter d'une tranquillité appréciable pendant ces quelques jours. Ils eurent le temps de s'accorder sur leur future étape : une visite à Auguste Loret, l'homme qui aurait travaillé comme agent de Carlyle. Une visite au bureau de poste central du Caire leur permit d'obtenir l'adresse de M. Loret en insistant auprès d'un employé à l'amabilité relative. Il leur fallait trouver une "porte rouge" dans l'Allée des Scorpions, une rue du Vieux Caire. Quand ils poussèrent la porte en question, ils tombèrent nez à nez avec un tailleur de pierre au travail. L'égyptien les salua pendant qu'il continuait à marteler la pierre. Lorsqu'ils l'interrogèrent au sujet d'un occidental nommé Loret, l'homme répondit qu'il n'avait jamais entendu parler de ce nom. Mais ils remarquèrent que leur interlocuteur avait jeté un coup d'oeil vers un rideau tiré qui donnait probablement sur une autre pièce. Du coup, ils se dirigèrent vers le rideau d'un air le plus naturel possible, en prétextant au tailleur qu'ils connaissaient déjà Loret et qu'il n'y avait pas lieu de leur cacher quelque chose.

La scène sur laquelle ils débouchèrent était assez pitoyable. Un homme était allongé sur une paillasse au milieu d'une petite pièce à vivre mal entretenue, jonchée de cendriers pleins. Ses yeux, perdus dans le vague, étaient cernés et sa barbe mal entretenue. Il paraissait terriblement fatigué. Quand ils le saluèrent, Auguste Loret s'exprima de façon confuse et décousue, répondant qu'il était prêt à parler contre de l'argent. Cela n'avait rien de surprenant compte tenu de la pauvreté dans laquelle il vivait. Mais au delà de ça, Jake, qui n'était pas né de la dernière pluie, avait reconnu rapidement les traits caractéristiques d'un toxicomane. Loret avait dû sombrer dans le haschich depuis un bon moment déjà pour en arriver là. Edward était ému par la vision d'un homme sûrement respectable tombé si bas probablement à cause du Pharaon noir, mais pour Moïra il était hors de question de dilapider le peu d'argent qu'il leur restait pour un drogué, tout misérable qu'il fut. Elle dirigea vers Auguste Loret un regard et des mots si durs que ce dernier céda, et commença à raconter son histoire...

Tout avait débuté au moment où il avait accepté de travailler pour Carlyle. Il avait acheté pour lui des objets à un antiquaire égyptien, Faraz Najir, et les avait fait expédier à la Fondation Penhew à Londres. Et puis, l'expédition était arrivée au Caire, et ils les avaient suivi sur le site de fouilles dans le Dashiur. Un jour, Brady était venu le trouver,  affolé. Aubrey Penhew, Roger Carlyle, Hypathia Masters et le Docteur Hudson avaient pénétré dans la pyramide inclinée depuis des heures, et ils n'en étaient toujours pas ressortis. Plus grave, les ouvriers et avaient fui le site. Loret et Brady avaient attendu, et finalement, les quatre autre membres du groupe étaient ressortis, au total au bout d'environ 24h. Il était clair qu'ils avaient découvert quelque chose, mais ne voulaient pas dévoiler de quoi il s'agissait. Ils avaient changé, leur comportement était devenu étrange. Le plus inquiétant pour Loret était le fait qu'inexplicablement, Sir Aubrey Penhew semblait avoir rajeuni... De plus, il avait entendu dess locaux dirent que les visiteurs étrangers avait invoqué le "Messager du Vent Noir". Quand ils les avaient interrogé, ces derniers lui avait dit de se rendre à la pyramide effondrée de Medoum "pendant la lune la plus mince", car c'était là le lieu et l'heure de leur rendez-vous. Poussé par la curiosité, Loret avait suivi ces instructions, sans se douter que ce choix allait lui coûter très cher. Tapis derrière une dune, ils avaient aperçu une centaine de personnes rassemblées devant la pyramide. Celles-ci s'étaient livrées à des rites obscènes jusqu'à ce que quelque chose d'encore plus terrible se produise. Des "créatures", qu'ils n'avaient pas pu bien distinguer dans la nuit, étaient sorties des ruines alentours et s'étaient jetées sur les participants au rituel. Elles avaient dévoré tout le monde, sauf les occidentaux. Et puis finalement, une immense créature "à cinq têtes" avait surgi de nulle part. A cet instant précis, les investigateurs lisaient une terreur absolue dans les yeux d'Auguste Loret, qui avait dû mal à en dire plus. Le monstre gigantesque s'était repu des cadavres d'humains et des créatures sorties du désert, jusqu'à ce qu'il ne reste que les membres de l'expédition. Terrifié, Loret avait pris la fuite. Mais alors qu'il s'était éloigné des pyramides, l'horreur l'avait rattrapé au milieu du désert : il s'était retrouvé face à une centaine de sphynx noirs. Cette vision dépassant l'entendement avait eu raison de lui, il avait perdu connaissance. A partir de là, il ne se souvenait plus de rien. Il avait été découvert par un homme, Umba, et sa mère, Nimti, qui habitaient Elwesta, une localité au sud de Medoum. Ils l'avaient sauvé et maintenu en vie pendant deux ans, alors qu'il avait semblait-il sombré dans une folie paralysante... Depuis, même s'il était revenu au Caire, il n'était plus que l'ombre de lui-même et se réfugiait dans les vapeurs du haschich...

Ainsi, les investigateurs ressortirent de leur visite à Auguste Loret quelque peu attristés par ce destin funeste, mais satisfaits d'avoir appris de précieux détails sur l'expédition Carlyle.

Sur le chemin du retour, Fanta suggéra de jeter un œil à la presse du jour. De fait, un article intéressant les attendait : un journaliste rapportait qu'un mystère quasi complet entourait toujours l'expédition Clive mais que néanmoins, on avait entendu des cris en provenance de la pyramide de Menphis... Les investigateurs se surprirent à oser espérer que la destruction de la ceinture avait peut-être eu une incidence sur la momie de Nectronis... Leur prochaine étape ne devait-elle pas consister à se rendre à Menphis pour en avoir le cœur net ?